Next up on the reading list of Harvard’s 20th Century French Theater and Performance course is Les Justes, by Albert Camus. Premiering in 1949, Les Justes is an examination of whether and when the ends can justify the means. The context of the play is the 1908 assassination of Russia’s Grand Duke Sergei Alexandrovich, uncle to the Tsar, an actual historic event carried out by a small group of Socialists plotting a revolution. The play itself concerns imagined discussions among the conspirators about the morality of their action, whether it matters, and if collateral damage changes the equation. It is a classical realist work with a clear five act structure, five major and four minor characters, and a mix of répliques (short lines) and tirades (extended speeches).
Camus wrote Les Justes in part as a response to arguments with Jean-Paul Sartre about the acceptability of political violence. Sartre was on the side of allowing a certain amount of individual or even random violence in order to overturn capitalism and colonialism, which he saw as long-term inflictors of systemic violence on populations. Camus was on the other side, drawing sharp limits on what was morally conscionable (as well as what was long-term effective) regardless of circumstance. This debate is very nicely described in a 2005 article by Ronald Aronson, Sartre contre Camus : le conflit jamais résolu. Eight years later, in 1957, Camus published a pair of essays Réflexions sur la guillotine and Réflexions sur la peine capitale in which he also objected to state sponsored execution. This topic remains hotly debated in France today, even though the death penalty was outlawed in 1981. Recent acts of terrorism on French soil (for example, the 13 November 2015 attacks at the Bataclan theater and elsewhere, the trial for which began last month) have raised the question of whether those guilty of atrocities deserve to die. So the work remains timely even though it is a 70-year-old work about a 110-year-old plot.
I wrote out some thoughts about the play, which unexpectedly grew to nearly 1,200 words. I lightly revised it during an editing session with my teacher.
Pourquoi écrire une pièce philosophique?
Les Justes, par Albert Camus
J’étais lycéen quand j’ai appris l’existence d’Albert Camus – et le mot «existence» est bien choisi, car au lycée le nom de cet écrivain était synonyme de la philosophie de l’existentialisme. Mes camarades de classe non francophones ont dû lire L’Étranger en traduction pour leurs classes d’anglais, pendant que nous francophones le lisions en version originale pour nos cours français. Le vocabulaire est simple et le titre connu, donc les profs l’ont choisi, même si l’existentialisme était peu accessible à la plupart des adolescents. Peu importe – c’est un roman philosophique, et donc bien convenable pour le lycée.
L’Étranger est un roman philosophique, et Les Justes est une pièce philosophique. Pourquoi écrire une œuvre littéraire philosophique? Pourquoi ne pas écrire un traité comme Locke ou Kant? Ou un essai comme Montesquieu? L’enseignant norvégien Jostein Gaarder a écrit Le Monde de Sophie, un roman sur l’histoire de la philosophie (très bon, d’ailleurs), mais c’est autre chose: un texte pour lycéens sous forme de roman plutôt qu’un roman philosophique. Alors, pourquoi? À l’université, j’ai suivi un cours de philosophie avec Michael Sandel. Il nous a conseillé (presque à chaque cours) d’examiner chaque théorie philosophique par rapport à la situation. Êtes-vous d’accord avec cette proposition-ci? Appliquez-la dans cette situation-là. Vous n’aimez pas les conséquences qui suivent? Comment adapter la théorie? Et maintenant, appliquez la théorie modifiée à la prochaine situation posée.
Sandel nommait ce mode d’analyse «la dialectique»: passer de la théorie à la pratique et retourner en boucle. Il nous a mis en garde de ne pas espérer trouver une philosophie parfaite, qui s’accorde avec toutes nos intuitions. Pour lui, engager cette dissonance entre l’idéal et le réel est lui-même un bien incontournable. Si nous sommes des êtres qui pensent, nous changerons nos idées quand nos théories se heurteront à nos réalités. Nous changerons nos actions. Et c’est justement ça, la raison pour écrire une pièce philosophique. Camus ne nous montre pas seulement des gens qui affinent leurs idées au cours d’un débat, à la manière de Platon dans ses Dialogues Socratiques, mais des gens qui affinent leurs comportements au cours de la vie vécue. Il y a des dissonances, il y des imperfections, et des incohérences. Mais il n’y a pas un manque de conclusions. Comme Sandel disait: «N’imaginez pas que vous n’avez pas de réponse aux questions philosophiques difficiles: par vos actions et vos inactions, vous vivez des réponses à de telles questions tous les jours.»
Alors, examinons les personnages de la pièce. S’ils n’évoluent pas, ça ne vaut pas la peine d’écrire une pièce et plutôt qu’un traité. Bien sûr, ce n’est pas nécessaire que tous les personnages changent de cheval au milieu du gué. Certains personnages ne sont que les incarnations de théories, presque des figurants. Les gens que Kaliayev rencontre en taule sont plutôt des caricatures que des personnages. Foka? Il représente le fatalisme, un cul-terreux qui a tué les gens quand il était ivre et qui continue à tuer les gens comme bourreau pour réduire sa peine. Skouratov? Il parle la langue des Athéniens dans la dialogue de Thucydide: «les forts exercent leur pouvoir et les faibles doivent leur céder». La Grande-Duchesse est un portrait de la religiosité, et le Gardien un croquis de celui qui baisse les yeux et évite d’attirer la moindre attention. Leurs vies intérieures ne nous concernent pas.
Qu’en est-t-il des conspirateurs ? Ils ont beaucoup plus de répliques que les personnages ci-dessus, mais la plupart des conspirateurs restent inertes aussi. Boris est un guerrier noble et humain: il préfère attendre deux mois pour avoir la bonne opportunité de tuer la cible, seule et nette, que d’agir comme prévu et de risquer des victimes innocentes. Il décide que le meurtre des enfants n’est pas permis, et inutile de plus. Par contre, Stepan est rempli de haine et d’amertume au début, au milieu, et à la fin. Ni la présence des neveux du Grand-Duc, ni la mort de celui-ci occasionne une reconsidération de son désir pour la violence illimitée. La noblesse ne le concerne pas: «L’honneur est un luxe réservé à ceux qui ont des calèches», dit-il. Tous les deux gardent leurs attitudes originales au cours de la pièce, sans difficulté et apparemment sans réfléchir.
Donc, il nous reste Voinov, Kaliayev (dit Yanek), et Doulebov (dit Dora). Voinov adopte facilement le discours de l’Organisation, mais il flanche quand l’opportunité d’agir se présente. On imagine qu’il n’est pas un peureux, mais qu’il ne croit pas vraiment que la politique vaille de tuer ou de mourir. Pour sa famille ? Pour sa propre vie ? Qui sait ? Mais pas pour la politique.
Yanek est peut-être le personnage principal. Au premier acte il annonce sa fidélité à l’Organisation, et il affirme qu’il tuerait le Grand-Duc même s’il reconnaissait l’humanité de celui-ci. Au deuxième acte il découvre ses limites quand il refuse de tuer les neveux innocents, et au troisième acte il se montre résolu en lançant la bombe et en tuant le Grand-Duc. Yanek a survécu à sa crise philosophique, et garde sa solidarité avec ses camarades au quatrième acte en refusant les propositions de Skouratov en prison. Mais est-ce qu’il a réexaminé ses principes, ou en a-t-il seulement fait l’épreuve ? Pour moi, Yanek est un exemple et une dramatisation de tenir à l’idée que tout n’est pas permis, mais pas vraiment un exemple de dialogue entre la théorie et la pratique.
Enfin, il y a Dora. Au premier acte, Dora avertit Yanek de ne pas faiblir au dernier moment en face du Grand-Duc, mais j’estime qu’elle parle vraiment d’elle-même: elle aurait peur de renoncer à l’attentat si elle voyait le visage de sa victime. Au deuxième acte, elle dit qu’elle ne pense pas non plus que le meurtre des enfants innocents soit justifié. Mais la mort de son amant Yanek la fait changer d’avis. Elle tombe d’accord avec Stepan, à travers une perte personnelle. Au début de la pièce, elle doute que venger les offenses abstraites par un crime contre un individu soit juste. À la fin, elle se hâte de prendre sa revanche contre le monde pour lui avoir volé son amoureux, peu importe l’Organisation ou la justice. Elle est vraiment transformée par l’expérience et la réflexion.
Est-ce que ces deux illustrations, la fermeté de Yanek et la désolation de Dora, méritent une pièce entière? J’estime que non. Mais je pense que Camus a raison d’extraire la philosophie du royaume intellectuel. La philosophie est comme un plan, ce qu’on imagine qu’on ferait dans telle ou telle situation. Mais rappelons-nous les mots du boxeur américain Mike Tyson : «Tout le monde a un plan jusqu’à ce qu’on lui frappe la bouche.» Les Justes nous montre la philosophie de Dora, bouche sanglante.
Not a bad essay, and better than my previous one on L’Amante anglaise, but still a bit light as literary criticism goes. Still, a good canvas on which to learn French. Here’s some things I learned from it.
Things I Learned
Once again I’m omitting boring errors in preposition choice, adjective agreement, or omission of reflexive pronoun. I’m getting better at these, and that may be the biggest benefit by volume of writing each week. But they don’t make for interesting reading so I’ll spare you. Here’s more interesting things I learned.
- Keeping a consistent register. This essay started out in a high register with words like émender and précautioner, but that was not my intent. I have written a few high-register things lately and wanted to make this piece more familiar. I have a ways to go still. I also over-corrected, using near-slang expressions like ça ne vaut pas la peine, en taule, cul-terreux, and froussard. I still struggle to recognize when a word or expression that comes to mind is in vieux / soutenu or a familier / argot register, and it would be time-consuming to look up each and every one. I suspect the only solution is listen and read more, plus get more feedback on my writing.
- Qu’en est-il de is a super-useful expression I some hadn’t come upon until this month. It means “What about … ?”, and asks for an opinion or information about the disposition of something. It’s useful both for requesting information or as a rhetorical way to introduce a next subject or part of a problem to be addressed.
- Froussard, trouillard, poltron, … there are a surprising number of words to indicate somebody who is afraid or who scares easily. They differ in connotation as well as register of language. Peureux is a standard word for someone who is generally fearful or timid. Pleutre and couard are both littéraire. Lâche is more insulting. Froussard, trouillard, and poltron are familier.
- Changing hearts and minds: in English, one can present an argument to change somebody’s mind. In French, I can change my own mind (J’ai changé mon avis), but it’s not typical to use changer d’avis as a thing that A does to B. (
J’ai changé son avis). Correct is to use the construction faire changer: Je l’ai fait changer d’avis. - Best served cold …: the word dédommager is best translated as “compensate” or “indemnify”. The reflexive se (faire) dédommager is about seeking damages or settling claims. If you want to get revenge or justice at a moral level, you should use the express venger or prendre revanche.
I didn’t love this play, but it did make me more interested in Camus. I ordered a copy of his novel La Peste from the local bookstore, which seems particularly apropos given our pandemic. I knew about it vaguely, but heard about it recently in a radio interview with Marylin Maeso who was discussion her recent book La fabrique de l’inhumain, which very explicitly makes the case that the Covid-19 epidemic parallels the story of that novel. I’ll let y’all know what I think of La Peste when I read it.
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